Une conception de moralité pour la théorie économique

Detalhes bibliográficos
Autor(a) principal: Lopes, H.
Data de Publicação: 2003
Tipo de documento: Artigo
Idioma: fra
Título da fonte: Repositório Científico de Acesso Aberto de Portugal (Repositórios Cientìficos)
Texto Completo: http://hdl.handle.net/10071/490
Resumo: Le désir intime de tout économiste pourrait certainement s’exprimer par cette phrase de Rousseau, en exergue de son Contrat Social : “Je tâcherai d’allier toujours, dans cette recherche, ce que le droit permet avec ce que l’intérêt prescrit, afin que la justice et l’utilité ne se trouvent point divisées”. Pourtant, la science économique contemporaine est, à juste titre, accusée de veiller beaucoup plus aux intérêts qu’à la justice malgré les croissants et louables efforts de beaucoup d’économistes pour rapprocher et même réconcilier la recherche de l’intérêt et les exigences de l’éthique 1. Mais le domaine de l’éthique ne se prête pas aux contraintes d’une science universaliste. Ainsi, les économistes sont-ils déchirés, au moins depuis la fin du 19ème siècle, entre leur désir intime et le désir de faire science2. L’évacuation de la dimension morale en théorie économique conduit à des impasses, tant lorsque l’économie se veut positive que lorsqu’elle s’assume comme normative, déjà maintes fois dénoncées. Le théoricien a de plus en plus de mal à rendre compte de la coopération et de l’action collective, que ce soit dans la théorie de l’entreprise et la relation de travail ou sur les marchés de produits et les marchés financiers3. Les comportements qui sont motivés par des critères de justice ou d’autres valeurs morales plus que par la recherche de l’intérêt personnel – comme la contribution volontaire aux biens publics, le respect de contrats incomplètement spécifiés, et, en général, les conditions de base de l’ordre social – sont inexplicables au vu de la rationalité instrumentale. L’objectif de ce texte est d’analyser les rapports entre la moralité et la rationalité économique, rationalité instrumentale. L’utilitarisme, principal représentant du libéralisme téléologique ou conséquentialiste, constitue le fondement philosophique de la science économique, laquelle est ainsi fondamentalement étrangère à l’autre grande famille de doctrines morales, la déontologie. L’exigence de rationalité, qui implique que l’on se conduise en toutes circonstances de façon maximisatrice, semble inconciliable avec la prise en compte d’éléments déontologiques tels que des interdits et des obligations absolues. Partant du postulat que l’on ne saurait se satisfaire de modèles de comportements qui n’intègrent que l’aspect conséquentialiste, notre objectif est triple: - montrer que la prise en compte d’éléments déontologiques est irréductiblement incompatible avec la formalisation de la rationalité comme maximisation d’une fonction d’utilité; - montrer que les contraintes morales ne peuvent être réduites au statut d’instrument pour l’atteinte d’une certaine fin; - ne pas se limiter, toutefois, à enregistrer l’impossibilité de conciliation entre éthique déontologique et rationalité conséquentialiste mais chercher les grandes voies d’une cohabitation possible. Pour ce faire, nous explorerons certains domaines de la philosophie morale avec l’objectif strict d’y rechercher des contributions qui nous aident à préciser le statut de la moralité dans la conception du comportement économique. Mais tout d’abord, un retour sur la notion de rationalité s’avère nécessaire pour préciser nos objectifs et orienter notre réflexion.
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